Feynman - La nature de la Physique
Aujourd'hui, nos théories physiques, les lois de la physique sont faites d'un tas de pièces et de morceaux qui ne s'ajustent pas très bien.
Toutes les masses tombant, la lumière ayant de l'énergie et l'énergie équivalent à une masse, la lumière tombe donc.
C'est la même chose, pour toutes nos autres lois, elles ne sont pas exactes. Il y a toujours un côté mystérieux, toujours un endroit que nous devons encore un peu fignoler.
Ceci aussi est commun à toutes nos lois, il se trouve qu'elles sont toutes simples, bien que leurs manifestations concrètes soient complexes.
La nature n'utilise que les plus longs fils pour tisser ses motifs, de sorte que la plus petite pièce révèle la structure de la tapisserie toute entière.
On ne peut sérieusement expliquer la beauté des lois de la nature et surtout la faire ressentir, a des gens qui n'ont aucune connaissance profonde des mathématiques.
Les mathématiques ne sont pas juste un autre langage.
Les mathématiques sont un outil pour le raisonnement.
En fait le total de ce que sait un physicien est très mince.
Je sais, c'est ça l'ennui avec la physique, elle doit être mathématique.
Apres beaucoup d'expériences, nous avons appris qu'on ne peut se fier à aucune intuition philosophique sur le comportement de la nature.
C'est l'un des aspects stupéfiants de la nature que cette diversité des schémas d'interprétation.
Les mathématiciens ne s'occupent que de la structure du raisonnement et ne s'intéressent pas vraiment à ce dont ils parlent.
La rigueur mathématique la plus raffinée n'est pas très utile en physique.
Imaginons que la physique, ou plutôt la nature, est un vaste jeu d'échecs, avec des millions de pièces, et que nous nous efforçons de découvrir la règle du jeu. Les grandes divinités qui jouent le font très rapidement, on a de la peine à suivre et à comprendre.
Les physiciens ont tendance à se croire si supérieurs et si malins que les autres gens aimeraient bien les coincer.
Que toutes les molécules des créatures vivantes aient exactement le même type de filetage fournit sans doute l'une des preuves les plus profondes de l'uniformité de l'histoire de la vie, depuis le stade purement moléculaire.
Dans la possibilité de distinguer la droite et la gauche, il y a un aspect très important : ce n'est possible qu'en utilisant un effet très faible, avec cette désintégration bêta.
Ces lois ont une caractéristique étrange : souvent elles semblent devenir de plus en plus déraisonnables, de moins en moins intuitivement évidentes.
Je crois pouvoir dire à coup sur que personne ne comprend la mécanique quantique.
Ce qu'il nous faut pour que la science progresse, c'est la capacité d'expérimenter, l'honnêteté d'en rapporter les résultats - on ne doit pas donner comme résultats ceux qu'on aurait voulu trouver - et enfin, point essentiel, l'intelligence d'interpréter ces résultats.
C'est toujours avec les idées raisonnables qu'on rencontre des problèmes.
Si ça ne s'accorde pas avec l'expérience, c'est faux.
On n'est jamais sûr d'avoir raison, on ne peut qu'être sûr de se tromper.
Comme toujours, l'imagination de la nature dépasse de loin la notre.
Je suis persuadé que l'histoire ne se répète pas en physique.
Chaque fois qu'on se trouve bloqué dans un fouillis d'ennuis et de problèmes, c'est parce qu'on a utilisé les mêmes méthodes qu'avant.
Bien qu'elle soit incertaine, la science doit être utile.
Je trouve stupéfiant que l'on puisse prédire ce qui arrivera à l'aide des mathématiques, qui consistent simplement à suivre des règles n'ayant vraiment rien à voir avec ce qui se passe dans l'objet original.
La vérité peut se reconnaÓtre à sa beauté, à sa simplicité.
Ceux qui prétendent - bien que ce soit manifestement contredit tous les jours - que les femmes sont tout aussi capables de pensée rationnelle que les hommes, pourraient bien ne pas avoir tout à fait tort. Peut-être nos difficultés viennent-elles simplement de ce que nous n'avons pas encore trouvé le moyen de communiquer avec des cerveaux féminins. Mais quand on y arrive, il y a toujours quelque chose à en tirer.
C'est à cette époque que j'ai appris ce que c'est que la science : une grande patiente.
Le monde apparaît tellement différent quand on sait !
La science présente aussi cette qualité qu'elle nous enseigne les vertus de la pensée rationnelle, l'importance de la liberté de pensée, les effets bénéfiques du doute face aux leçons apprises.
La science est la croyance en l'ignorance des experts.
Parmi les disciplines enseignées, la science est la seule qui porte en elle cette leçon : il est dangereux de croire en l'infaillibilité des maîtres de la génération précédente. Alors, bon courage.
C'est comme quand vous tombez amoureux d'une femme : ça n'est possible que si vous ne la connaissez pas bien, et ne voyez pas ses défauts.
La meilleure méthode serait peut-être de deviner les équations, et d'éliminer les modèles ou les descriptions physiques.
Alors, ce que nous cherchons, c'est ce que nous trouverons, un point, c'est tout.
En fait, plus ce qu'il trouve le surprend, plus le physicien est content.
Mais bon Dieu, qu'est ce que c'est donc ?
Voilà ce que dira le physicien.
Si seulement les philosophes pouvaient ne pas se prendre tellement au sérieux.
Ce qui caractérise les bons scientifiques, c'est que, quoi qu'ils fassent, ils ne sont pas aussi sûrs d'eux que la plupart des autres. Ils arrivent à vivre avec le doute installé en eux.
Ce que nous sommes capables de comprendre n'est rien en comparaison de ce qui existe, on l'apprend au fur et à mesure que l'on fait de la physique.
Je ne comprends pas les gens, moi y compris.
J'ai appris à vivre sans savoir.
Tout est intéressant, à partir du moment où on s'y consacre vraiment.
Auteurs cités
JEANS: Le grand architecte semble être mathématicien.
MINKOWSKI: L'espace en soi et le temps en soi vont se dissiper en fumée, seule demeurera une sorte de mélange des deux.
DIRAC: Comprendre un problème physique, c'est être capable d'en voir la solution sans résoudre d'équations.